Le musée Cernuschi présente dès le 17 septembre 2024 une sélection de photographies de l'artiste japonais Kosuke Okahara issues de sa série Vanishing existence (Existence évanescente).

Salle Peinture
Musée Cernuschi
7 avenue Vélasquez, 75008 Paris

Accès gratuit dans les collections permanentes

Le projet Vanishing Existence

Réalisée en 2007, la série Vanishing Existence explore le quotidien des villages de lépreux principalement localisés dans le sud de la Chine. Etablis dans les années 1950, ces villages isolés ont pour fonction d’accueillir les personnes atteintes de la lèpre pour les placer en quarantaine et leur garantir un traitement. Sur les 1200 villages initialement créés, seulement 600 sont encore en activité au début des années 2000.

Ce projet photographique naît d’un constat, celui de la disparition progressive de ces villages en raison de l’âge avancé de leurs habitants. Or, puisque l’élimination complète de la lèpre progresse en Chine, il existe un risque que l’histoire de ces villages, et des personnes qui y ont vécu, disparaisse également. Les photographies de Kosuke Okahara cherchent ainsi à témoigner de ces existences mises à l’écart, sans pour autant s’attarder sur les séquelles physiques laissées par la maladie.

L’artiste voyage durant un mois et demi et visite plusieurs villages, accompagné d’un ami et d’un traducteur. Il choisit ensuite de publier ses photos d’abord sous la forme d’un livre dont la reliure traditionnelle est cousue à la main puis sous la forme d’un rouleau horizontal, reprenant ainsi les plus anciens supports d’écriture chinois, ancrant de cette façon son travail dans la tradition culturelle chinoise.


 

Des villages reculés

Les villages se trouvent dans des lieux difficiles d’accès, les éléments naturels tels que les rivières ou les montagnes faisant office de frontières entre les deux mondes.

En marge de la société, les villageois logent dans des habitations sans eau courante ni électricité et vivent principalement des récoltes qu’ils produisent eux-mêmes. Cet éloignement géographique entraîne également une mise à l’écart des circuits économiques, ne permettant qu’une vente limitée des produits agricoles.

Lors de ses différents séjours, Kosuke Okahara vit au cœur des villages, au plus proche de leurs habitants. Il y décrit une atmosphère tranquille, en partie due à la chaleur de l’été, où le temps s’écoule lentement. Il évoque également les soirées passées à discuter avec les villageois de leur histoire, mais également du monde extérieur.
 

Le village de Wuzhou

Le village de Wuzhou 梧州 se trouve sur une île située dans une rivière, accessible par bateau depuis la rive. L’arrivée du photographe constitue pour certains villageois leur première rencontre avec une personne venant d’un pays étranger à la Chine. Pour autant, les personnes dont il fait la connaissance se montrent accueillantes et ouvertes à la discussion.

En repartant de ce village, Kosuke Okahara est frappé par la distance symbolique qui sépare le village du reste de la société. Alors que lui ne met que cinq minutes pour traverser la rivière et retourner à la ville, il réalise que pour certains habitants qui ne l’ont pas traversée depuis des décennies, la distance est bien plus grande, presque infranchissable. Cette série de photographies témoigne de ces lieux hors du monde, figés dans une temporalité différente de la nôtre.
 


“La frontière qui les séparait de la société était bien plus large que la rivière”
                                                                           
Kosuke Okahara
                                                                                                                                                     

 

Eloignement et solitude

L’homme que l’on aperçoit notamment dans la photo Homme transportant de l’eau tirée du puits vit dans le village de Wuchuan 吴川 depuis quarante ans et choisit d’y rester bien qu’il soit guéri de la maladie. A 70 ans, il vit désormais seul dans le village et se charge à la fois de recueillir de l’eau au puits et de travailler dans la bananeraie.

Malgré les préjugés et la peur que suscite cette maladie, la lèpre est relativement peu contagieuse et les traitements mis en place depuis les années 1970 permettent de la soigner. Aucune loi n’empêche le retour des anciens malades à leurs familles, mais ceux-ci font face à une vive discrimination qui les pousse à rester isolés. Eloignés du monde extérieur, les habitants de ces villages évoquent auprès du photographe l’impossibilité pour eux de remédier à cette solitude qui dure depuis des décennies.


 

Kosuke Okahara

Kosuke Okahara 岡原功祐, né en 1980 à Tokyo, débute sa carrière de photojournaliste en 2004, en alternant des reportages d’actualité avec des projets artistiques et documentaires plus personnels.

Son premier projet à long terme, intitulé Ibasyo 居場所 (« un espace où l’on peut exister, être soi-même ») et amorcé en 2004, documente la vie quotidienne de six jeunes filles japonaises souffrant d’automutilation. Il publie également en 2008 sa série Almost Paradise, qui suit les trajectoires des migrants colombiens depuis leur pays d’origine jusqu’aux Etats-Unis. Avec un œil profondément humaniste et sensible, l’artiste s’attache à dévoiler des situations complexes, parfois taboues, et à offrir aux sujets photographiés une forme de reconnaissance.

Son travail, ancré dans l’actualité, lutte contre l’amnésie collective en utilisant la photographie comme outil de mémoire. Il réalise notamment entre 2011 et 2015 une série de photos à Fukushima, véritables fragments documentaires témoignant des conséquences de la catastrophe. Pour Kosuke Okahara, la photographie est un moyen de « capturer l’existence » de ce qui se trouve en face de lui. 

https://kosukeokahara.com

Rencontre avec Kosuke Okahara : vendredi 8 novembre - 18h (à l'auditorium du musée Cernuschi).
Réservation : cernuschi.reservation@paris.fr

Kosuke Okahara est un artiste représenté par la galerie Polka

www.polkagalerie.com

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