Shimomura Ryōnosuke
Le peintre et l'oiseau
3 June to 12 October 2025
A l’occasion de l’été japonais, le musée Cernuschi expose dans la salle peinture un ensemble d’œuvres de Shimomura Ryо̄nosuke (1923-1998) données par Shimomura Shizue, la veuve de l'artiste, en 2014. Acteur majeur de l’avant-garde artistique dans le Japon d’après-guerre et cofondateur de l’Association artistique Pan-Real en 1948, l'artiste s’attache à réinventer la peinture traditionnelle japonaise Nihonga.
Salle Peinture
1er étage du musée Cernuschi
7 avenue Vélasquez, 75008 Paris
Accès gratuit dans les collections permanentes
Shimomura Ryо̄nosuke 下村良之介 (1923-1998)
Shimomura Ryōnosuke se forme dès l’âge de 13 ans à la peinture de style traditionnel japonais (Nihonga) à l’actuelle Université municipale des Arts de Kyōto. Pour autant, il se détache rapidement de l’esthétique gracieuse associée à ce genre de peinture et incorpore progressivement des éléments issus de la peinture occidentale. Il fonde, en collaboration avec huit autres artistes issus de domaine artistiques variés, l’association Pan-Real Art en 1949. Dans le Japon d’après-guerre, ce groupe avant-gardiste cherche à élargir l’emploi de la peinture à la colle afin de rendre compte d’une réalité au sens large, laissant une grande place à l’abstraction et à l’expression des sensibilités. Personnage excentrique ayant développé un style hybride, Shimomura est un artiste prolifique qui crée jusqu’à la fin de sa vie des œuvres demandant patience et minutie. Il conserve en parallèle un poste d’enseignant en art, d’abord au lycée puis à l’université.
Shimomura Ryōnosuke, Ailes, 1959, encre et pigments sur préparation et sur toile. M.C. 2014-21, don Shimomura Shizue
Transmettre l'aura de l'oiseau
Son travail se caractérise par une stylisation graphique des motifs et par l’élaboration d’une technique particulière, à base de pâte de papier, apportant un relief travaillé avec précision à ses œuvres. Les oiseaux constituent son thème de prédilection, qu’il traite principalement sur de grands formats. Si l’artiste représente parfois des espèces particulières, tels que les coqs de combat, il développe également une vision plus abstraite de l’oiseau, qui tend d’abord vers la stylisation géométrique avant de céder le pas, au fil des années, à une forme d’étrangeté poétique. Shimomura intègre les oiseaux à des compositions plus ou moins abstraites à partir de 1954. Il développe au fil des années une réflexion autour de ce motif, qui devient central dans son œuvre. L’artiste cherche plus particulièrement à transmettre l’aura d’un oiseau en vol, non pas à travers une description physique du spécimen mais plutôt en recréant l’atmosphère qui l’entoure.

Pâte à papier, couleurs et encre sur papier marouflé sur bois.
M.C. 2014-25, don Shimomura Shizue.
CCO Paris Musées / Musée Cernuschi
Shimomura et la stylisation géométrique
Les premières œuvres de Shimomura témoignent d’une influence du mouvement cubiste, connu au Japon dès les années 1910. La fin de la guerre voit renaître un goût pour les courants modernistes parmi les jeunes artistes et Shimomura s’inspire des formes du cubisme, en insufflant à ses œuvres une dimension humaniste et sociale. Il poursuit cette recherche sur la forme lorsqu’il s’oriente vers des motifs plus abstraits. Les compositions sont alors structurées à l’aide de cercles, demi-cercles, lignes droites et triangles aigus, qui accentuent le dynamisme de l’ensemble. Dès le milieu des années 1950, Shimomura recourt à cette géométrisation pour faire apparaître des oiseaux dans ses créations. Les coqs, autre thème de l'artiste, reflètent son admiration pour le peintre Itō Jakuchū (1716- 1800) particulièrement renommé pour ses oiseaux stylisés aux couleurs éclatantes. Certaines œuvres de Jakuchū illustrent un travail du plumage par la répétition de motifs géométriques, que l’on trouve presque systématiquement dans les paravents de Shimomura.

Encre et couleurs sur papier. M.C. 2014-22, don Shimomura Shizue.
CCO Paris Musées/Musée Cernuschi
La technique de la pâte à papier
S’inscrivant dans le renouvellement de la peinture japonaise à base de pigments et de colle, principe fondamental de l’association Pan-Real Art, Shimomura élabore une technique à base de pâte de papier collée sur la surface de l’œuvre. Le papier de lin est d’abord mélangé avant d’être appliqué sur la surface préalablement encollée. L’artiste façonne ensuite cette pâte de papier à l’aide de moules en bois conçus à la main puis travaille les détails à l’aide d’un couteau à peinture. Il ajoute ensuite les pigments, tel que le traditionnel gofun à base de coquille d’huître, sur le relief ainsi créé.
Cette technique est l’une des caractéristiques les plus distinctives de l’artiste et témoigne de l’engagement physique que requièrent ses créations.
LES ŒUVRES DE SHIMOMURA SERONT EXCEPTIONNELLEMENT PRÉSENTÉES PAR ROULEMENT.
LE PREMIER EXPLORE SA RÉFLEXION CONCEPTUELLE ET TECHNIQUE AUTOUR DE L’OISEAU. LE SECOND (LE 21 JUILLET) ABORDE L’ÉVOLUTION DES REPRÉSENTATIONS DE COQS AU FIL DE SA VIE.

Pâte à papier, encre et couleurs. M.C. 2014-26, don Shimomura Shizue.
CCO Paris Musées/Musée Cernuschi