Un siècle d'acquisitions, déjà !

L'année 2022 marque le centenaire de la Société des Amis du musée Cernuschi. Afin de célébrer l'événement, découvrez chaque semaine un chef-d'œuvre parmi les objets offerts par la Société des Amis au musée Cernuschi, musée des arts de l'Asie de la Ville de Paris.

Société des Amis du musée Cernuschi
7 avenue Vélasquez - 75008 Paris

Accueil, uniquement par téléphone, le lundi de 10h à 13h et le mercredi

+33 (0)1 53 96 21 56
www.amis-musee-cernuschi.org

À travers la variété des formes et des techniques de ces œuvres symboliques ou de ces objets témoignant du quotidien, découvrez comme Henri Cernuschi lors de son grand voyage, l’histoire des grandes civilisations asiatiques incarnées par la Chine, la Corée, le Japon ou le Vietnam, depuis l’Antiquité jusqu’à nos jours.

52. Ornement de ceinture

Cet ornement de ceinture circulaire est caractéristique du royaume de Dian, qui rayonnait sur un vaste territoire situé dans la province actuelle du Yunnan, avant d’être intégré dans l’empire Han (206 av. J.-C.-220) au deuxième siècle avant notre ère. La culture de Dian se caractérise notamment par un art du bronze très original. Réalisé dans ce métal, cet objet comporte en son centre une protubérance en agate entourée d’une mosaïque de petits disques de malachite, une matière dont l’usage est récurrent dans la culture matérielle du royaume de Dian. Un élément de fixation situé sur la face arrière confirme sa fonction de jonction des extrémités d’une ceinture.

Certaines plaques de ce type, destinées à l’élite, comportaient également une frise d’animaux passants en haut-relief ajouré à leur pourtour. La plaque conservée au musée Cernuschi, plus simple, rappelle quant à elle les ornements de ceinture portés par les danseurs et chanteurs représentés sur les objets en bronze provenant de Shizhai shan, un site archéologique majeur fouillé dans les années 1950. Ces éléments circulaires au décor original diffèrent profondément des crochets de ceinture utilisés dans l’empire des Han : en ce sens il s’agit d’un marqueur de l’identité culturelle du royaume de Dian.

 

51. Disque bi

Des disques gravés similaires à celui-ci furent retrouvés dans des sépultures du royaume de Chu, à Changsha (Hunan). La tombe n°406 en contenait jusqu’à six. Un était placé sur le front, deux de chaque côté de la tête et deux autres près des genoux de la dépouille. Un dernier disque avait été glissé dans l’espace entre les deux cercueils imbriqués contenant le défunt, près de la tête de ce dernier. La tradition de placer deux disques de chaque côté de la tête du défunt se perpétuera à l’époque des Han de l’Ouest (206 av. J.-C.-9 ap. J.-C.) dans l’ancien royaume de Chu.

Traditionnellement, les disques bi sont interprétés comme un symbole du ciel, sur la base de textes de l’époque des Royaumes combattants (453-221 av. J.-C.) et des Han (206 av. J.-C.-220). Toutefois, leur positionnement dans ces tombes du Hunan rappelle plus particulièrement des mots du philosophe Zhuangzi (fin du IVe siècle av. J.-C.) qui, évoquant son décès proche, annonçait que le soleil et la lune seraient matérialisés dans sa tombe par deux disques bi.

Les disques de ce type, retrouvés dans les tombes de Changsha, ne sont souvent décorés que sur une seule face, au moyen de deux ensembles de lignes parallèles qui se croisent et de petits cercles qui soulignent ces points d’intersection. L’usage de la stéatite parait être un substitut local à la néphrite, matériau habituellement utilisé pour ces insignes.

 

50. Paravent en laque de Coromandel

Les laques de Coromandel tiennent leur nom des côtes est de l’Inde, où ils étaient débarqués des jonques chinoises pour être transférés sur les navires des compagnies des Indes. Ces objets, qui étaient le plus souvent destinés en Chine à être offerts à de hauts dignitaires, furent en effet largement importés en Europe, à partir du règne de Kangxi (1661-1722). À leur arrivée, ils intégraient en l’état des riches demeures ou étaient démembrés afin d’être réemployés comme panneaux décoratifs par des fabricants de meubles.

Ces œuvres sont réalisées au moyen d’une armature en bois recouverte d’un tissu et de plusieurs couches de laque, résine végétale qui se polymérise au contact de l’air. Le décor est ensuite gravé en creux, les contours restant en relief, puis peint au moyen de pigments rouges, bleus, verts et blancs, qui tranchent avec le fond de laque polie variant du brun au noir.

Au revers du présent paravent figurent des inscriptions dorées listant les personnes ayant contribué à l’offrir à un haut gradé militaire. Sur la face se déploie, dans un encadrement où alternent des objets liés à la culture des lettrés et des symboles auspicieux, la demeure du général Guo Ziyi (697-781), qui célèbre son anniversaire. Un cortège arrive par la droite pour se présenter au maître de maison, qui trône dans le pavillon central, tandis que la gauche de la composition est consacrée à la description du quartier des femmes. Cette iconographie constitue un sujet classique sur les paravents de cette époque.

 

49. Xie Zhiguang (1900-1976), Paysage

Les créations de jeunesse de Xie Zhiguang 謝之光 présentent deux facettes bien distinctes. Elles s’inscrivent d’abord dans les genres de la peinture classique revisités par les maîtres de l’école de Shanghai. Mais elles consistent aussi en un grand nombre de publicités, d’illustrations pour des calendriers et de couvertures de magazine tout à fait caractéristiques de la culture urbaine chinoise de l’entre-deux guerres.

Cette division entre deux types de production perdure après 1949. Xie Zhiguang est ainsi l’auteur de nombreux posters et d’encres réalisés dans un style maoïste, tout en signant des sujets classiques hérités de la peinture ancienne, avec une liberté de traitement remarquable, dont témoigne ce paysage daté des années 1970.

 

48. Agrafe

Les agrafes, apparues en Chine à partir du début de la période des Printemps et des Automnes 春秋 (722-481 av. J.-C.), servaient principalement à fermer solidement les ceintures en cuir. Ces accessoires sont en effet munis au revers d’une protubérance en forme de champignon qui était introduite dans l’ouverture percée à l’une des extrémités de la ceinture, tandis que leur appendice recourbé était passé dans l’œillet pratiqué à l’autre bout de celle-ci ou dans un anneau.

Ces objets très variés, tant par leurs dimensions que par leurs matériaux, leurs formes ou encore les techniques décoratives mises en œuvre, en vinrent à remplir toutes sortes d’usages : suspendre de menus outils, voire des armes, des accessoires du quotidien ou des ornements. À partir de la dynastie Jin 晉 (317-420), les agrafes disparurent peu à peu au profit des boucles de ceinture munies d’un ardillon.

L’avers de l’agrafe présentée ici est orné d’un motif d’animal couché (peut-être un loup) dont la queue s’enroule autour d’un chaton à l’intérieur duquel se trouvait, à l’origine, enchâssée une perle en pâte de verre.

 

47. Nakajima Yasumi II (1905-1986), Vase en forme de chrysanthème

Ce vase de forme globuleuse à la patine brun-rouge et à la panse ornée de godrons verticaux présente une ouverture à huit lobes qui font penser à une fleur de chrysanthème.

Depuis la seconde moitié de l’ère Meiji (1868-1912), on distingue trois principaux procédés de mise en forme du métal au Japon : la fonte (chūkin), dont cette œuvre de Nakajima Yasumi II constitue un exemple remarquable, le martelage (tankin) et la ciselure (chōkin). Quant aux métaux, avec l’or, l’argent, le cuivre et l’étain, le bronze est l’un des matériaux de prédilection des créateurs. Il est obtenu par l’alliage du cuivre () et de l’étain (suzu), dont le pourcentage varie selon les différentes tonalités de patine que l’on souhaite obtenir. À cette combinaison peuvent être ajoutées de petites quantités de zinc, de plomb, d’or ou d’argent afin d’obtenir des nuances encore plus sophistiquées.

Fils de l’artiste Yasumi I, Nakajima Yasumi II s’est formé à l’école nationale d’art appliqué de Sendai. En 1952, il a obtenu la médaille Hokuto-shō du salon des arts traditionnels japonais (Nitten) et en 1969 une médaille honorifique décernée par la préfecture d’Ōsaka.

 

46. Chang Yu dit Sanyu (1895-1966), Panthère

Chang Yu dit Sanyu est né en Chine dans la province du Sichuan. Issu d'un milieu cultivé, il appartient à une génération d’artistes qui se tournent vers l'Occident vers 1920. Après un séjour au Japon, Sanyu se rend ainsi en Europe en 1921. Il s’installe à Paris où il vivra principalement jusqu’à sa mort en 1966. Sanyu, dont l’œuvre a été redécouverte depuis les années 1980, est aujourd’hui l’un des plus célèbres représentants de la modernité parmi les artistes asiatiques actifs en France au XXème siècle.

Sanyu s’est rendu célèbre par ses représentations du corps féminin, dont les transformations anatomiques participent d’un déploiement de l’imaginaire souvent rapproché du surréalisme. Les sujets animaliers sont néanmoins fréquents dans son travail. Chevaux et félins dominent ce bestiaire. L’artiste a souvent représenté panthères et léopards au moyen des techniques qui lui sont le plus familières, comme la peinture à l’huile et le dessin à l’encre. De manière exceptionnelle, il recourt aussi à la sculpture ou à la gravure. C’est le cas pour cette œuvre, où Sanyu décrit le profil caractéristique de l’animal d’une ligne souple qui rappelle le tracé enlevé d’un pinceau chinois.

 

45. Paire de guerriers

Ces guerriers, dont les traits non-Han et le rictus se veulent effrayants, sont revêtus d’une « armure étincelante » mingguangkai 明光鎧. Cet équipement développé à la fin de la dynastie des Han de l’Est (25-220) tient son nom du plastron, composé d’une ou deux plaques de métal battu et poli, qui réfléchissait la lumière, d’où son appellation de « miroir(s) qui protège(nt) le cœur » huxinjing 護心鏡. Développée au cours de la dynastie des Han de l’Est (25-220), cette armure est mentionnée dans des sources écrites Tang et Song (960-1279) concernant le royaume de Wei 魏國 (222-265) en Chine du Nord.

Des substituts funéraires similaires ont été exhumés dans plusieurs tombes datables du second tiers du VIIe siècle tant à Luoyang 洛陽 au Henan (la Capitale de l’Est 東都), qu’aux environs de Xi’an 西安 au Shaanxi (capitale principale alors appelée Chang’an 長安). Ils ne semblent pas avoir joué le rôle de gardiens de tombe mais plutôt celui de gardes personnels du défunt. Dans la tombe du général Zheng Rentai 鄭仁泰 (d. 663) située dans la sous-préfecture de Liquan 禮泉縣 (Shaanxi) par exemple, ils avaient été placés dans les troisièmes niches de gauche et de droite flanquant le corridor d’accès, c'est-à-dire au centre du complexe funéraire.

 

44. Idole : deux bouquetins affrontés

Réalisé en fonte de bronze à la cire perdue, cet objet mystérieux est composé de deux bouquetins affrontés, dressés sur leurs pattes postérieures, prenant appui sur un anneau. Un second anneau est formé par leurs pattes antérieures qui se rejoignent.

Il provient du Luristan, une région parcourue de nombreuses chaînes de montagnes s’étendant à l’ouest de l’Iran. Sa qualité technique et sa stylisation exceptionnelle en font un objet caractéristique de la production de bronzes à l’aube du Ier millénaire avant notre ère. Il provient de l’une des tombes d’une civilisation demeurée mystérieuse car ne connaissant pas l’écriture. Son usage est incertain : ornement, objet de culte, talisman ?

La civilisation du Luristan de l’époque pratiquait l’élevage des chevaux et commerçait avec la Mésopotamie voisine. On en décèle l’influence à travers l’écho du motif de l’arbre de vie flanqué de deux animaux affrontés. Les anneaux entre les pattes des bouquetins servaient peut-être de support à un rameau végétal.

 

43. Vase yan

Les vases yan, dont la forme dérive de céramiques néolithiques, servaient à cuire des aliments à la vapeur. Les pieds creux contenaient l’eau, tandis que la cuve, séparée de ces derniers par une plaque mobile ajourée, était destinée à recevoir la nourriture. Les yan, parfois traités en deux éléments séparés et superposables, perdurèrent jusqu’à l’époque des Han (206 av. J.-C. – 220).

Les trois pieds prennent ici la forme de masques de taotie, créature fantastique dont la présence est récurrente sur les bronzes archaïques chinois. Ils sont traités avec un relief affirmé et surmontés de cornes, dont la présence est usuelle depuis la fin des Shang (vers 1500 – vers 1050 av. J.-C.), lorsque les représentations de taotie se voient souvent adjoindre des attributs issus d’animaux réels. La panse est quant à elle simplement ornée d’un bandeau horizontal constitué de spirales carrées, appelées leiwen en chinois, et de trois autres masques de taotie réduits à leur plus simple expression. Ces motifs rappellent la persistance, au début des Zhou de l’Ouest (vers 1050 – 771 av. J.-C.), d’un vocabulaire décoratif élaboré sous les Shang. Les anses torsadées évoquent, quant à elles, de possibles modèles en vannerie.

 

42. Support pour tâter les pouls

Les supports en forme d’oreiller miniature sont l’un des instruments indispensables des médecins et thérapeutes de la médecine traditionnelle chinoise. Ces derniers se servent, en effet, de quatre méthodes d’examens pour établir un diagnostic : la vue, l’ouïe, la parole (le questionnement) et le toucher qui consiste à palper le corps du patient et à tâter les pouls. Pour procéder à ce dernier examen, il convient de surélever le poignet grâce au coussin de prise de pouls (màizhěn 脉枕), qui peut être constitué de toutes sortes de matériaux.

Celui du musée, formé de plaques d’argiles assemblées à la barbotine, est revêtu, à l’exception de la base plate, d’une couverte blanche, pauvre en alumine et opacifiée à l’oxyde de phosphore. Ce dernier est responsable de la couleur mousse très douce des touches d’oxyde de cuivre déposées au pinceau.

Ce décor abstrait, aux motifs dénués de contours (mògǔ 没骨), pourrait s’inscrire dans la vogue d’un certain exotisme, ici iranien ou indien.

 

41. Vase wenjiu zun

Ce type de vase servait à contenir de l’alcool. Ses trois pieds, qui surélèvent la cuve, permettaient de chauffer ou réchauffer la boisson en plaçant le récipient sur un foyer. On trouve de multiples exemples de wenjiu zun dans des tombes de la fin des Han de l’Ouest (206 av. J.-C. – 9 ap. J.-C.) et du début des Han de l’Est (25 – 220). Les pièces les plus similaires à celle du musée Cernuschi ont été retrouvées majoritairement dans le sud de la Chine.

La destination funéraire de ce récipient justifie la dense iconographie qui couvre ses parois et son couvercle. Les animaux ailés qui servent de pieds au vase ainsi que les félins passants, organisés en deux registres superposés sur la panse, sont ainsi des motifs qu’on retrouve régulièrement dans les décors architecturaux des sépultures. Le couvercle, en forme de montagne peuplée d’un bestiaire abondant, évoque quant à lui des îles censément habitées par des immortels, à l’est du continent chinois. Ces références à un imaginaire lié au taoïsme expliquent également la présence, au sommet de l’objet, d’un motif aviaire. Celui-ci peut aussi bien être l’oiseau vermillon, qui symbolise le sud et est très souvent associé dans les tombes aux autres animaux des quatre orients, qu’un paon, animal-attribut d’une divinité majeure de cette religion : la reine-mère de l’Ouest (Xiwangmu).

 

40. Gourde à "crête-de-coq"

L’appellation moderne "gourde à crête-de-coq" jiguanhu 鶏冠壷 désigne des récipients en céramique dont le sommet est prolongé par une arête sur le côté de laquelle est implanté un goulot tubulaire. Ces contenants en forme de bourse, caractéristiques de la dynastie Liao, sont inspirés des gourdes en peaux cousues utilisées par les Khitan. Cette population de pasteurs installée sur la frontière nord de l’empire Tang (618-907) entretenait des relations avec la sphère chinoise depuis de longs siècles.

Des gourdes de ce type, qui ne sont pas encore couronnées d’une crête, ont été exhumées de sépultures attribuées aux Khitan contemporaines de la dynastie Tang. Réalisées en terre cuite dénuée de revêtement, elles pourraient avoir été fonctionnelles.

La gourde M.C. 9825, quant à elle, est un substitut funéraire. Des spécimens similaires ont été exhumés de tombes khitan datables du premier quart du XIe siècle. Des fragments de céramiques revêtues de glaçure borique ont été trouvés sur le site des fours de Longquancun 龍泉村 dans la municipalité de Pékin (Hebei).

 

39. Bol yu

Malgré leur nombre relativement réduit dans les tombes de la période d’Anyang (vers 1300 – vers 1050 av. J.-C.), par rapport à d’autres types de récipients tels que les coupes gu, les gobelets jue, les tripodes ding ou les vases gui, les bols yu sont des formes bien connues sous les Shang (vers 1550 – vers 1050 av. J.-C.). On en trouve en effet à cette époque de multiples exemplaires, aussi bien en bronze qu’en céramique. D’une silhouette semblable à celle des gui, hormis l’absence d’anses, les yu pouvaient être promis, comme ces derniers, à contenir des céréales lors de leur utilisation dans des rituels. Certains yu semblent cependant avoir été destinés à accueillir de l’eau, utilisée lors d’ablutions cérémonielles.

L’objet du musée Cernuschi présente une organisation du décor en registres horizontaux, à la manière de la plupart des bronzes Shang. Un bandeau sur le pied alterne des motifs cruciformes et des médaillons contenant cinq spirales gravées autour d’un cercle. Un autre bandeau, au-dessus de la panse laissée nue, est constitué de cigales affrontées trois par trois, de part et d’autre d’un masque animalier en relief. La cigale est un motif fréquent sur les bronzes chinois. On la suppose associée à l’idée de renaissance, en raison notamment de son apparition récurrente dans les pratiques funéraires Han (206 av. J-C. – 220). Aucun texte de l’époque des Shang ne permet toutefois de corroborer cette hypothèse. 

 

38. Zheng Weipei (actif dans les années 1730), Quatre aigrettes sur une branche

Zheng Weipei, né à Yangzhou au début du XVIIIe siècle, est connu aujourd’hui uniquement pour des œuvres produites au Japon, où il suit en 1731 Shen Quan (Shen Nanpin, vers 1682-après 1760), qui fait école dans l’archipel par l’introduction d’un style de peinture à la fois naturaliste et décoratif.

Toutefois, alors que Shen Nanpin diffuse, pendant ses deux années passées au Japon, des modèles élaborés en Chine, Zheng Weipei incorpore à ses œuvres de nombreux codes issus de son nouvel environnement artistique, ainsi que le démontrent la composition de ce rouleau, basée sur une oblique, et le fond recouvert d’un léger lavis sur lequel les aigrettes se détachent en réserve. Ce jeu de délimitation négative des formes permet à l’artiste de souligner ces dernières par un liseré vide qui leur donne plus de présence et, dans le cas de la branche d’arbre, en souligne le relief et le volume. Le traitement des volatiles et des feuilles de l’arbre, par son caractère inédit, témoigne du vocabulaire nouveau produit par l’hybridation des styles chinois et japonais. Le sujet de la peinture, la pureté immaculée de ces quatre aigrettes indifférentes aux jalousies, est explicité par une citation du poète chinois Xiao Yingshi (707-758).

 

37. Vantail de porte, Han de l'Est

Les tombes de l’époque Han s’inspirent très souvent de l’architecture des habitations et des palais. On y retrouve donc fréquemment des éléments qui évoquent ou font véritablement office de piliers, d’architraves soutenues par des bras et des corbeaux ou de portes. Cette inspiration puisée dans les édifices en bois est ici particulièrement sensible dans ce vantail d’une porte d’entrée donnant accès à une sépulture. Cette dalle de pierre est en effet ornée d’un motif de masque pushou, qui reproduit les poignées métalliques placées sur les portes des grandes demeures.

Ce décor est surmonté d’un dragon et d’un oiseau. Tous deux vu de profils, ils faisaient face, selon toute vraisemblance, à un tigre et à un autre oiseau figurés sur le vantail de droite. Ces éléments participent d’un programme iconographique plus large qui donne son sens à la tombe, en situant celle-ci dans l’espace, en contribuant à protéger symboliquement le défunt et en multipliant les références à l’immortalité. Le style des animaux et le fond strié de la porte évoquent très fortement des exemples similaires retrouvés dans la région du Sichuan.

 

36. Vase zun

La forme du pied tronconique, du col évasé et de la panse large de ce zun en bronze est caractéristique de l’époque des Shang (vers 1600 – vers 1050 avant notre ère). Ce type de vase, retrouvé en grand nombre, était destiné à contenir des boissons lors de cérémonies rituelles et d’inhumations. La répartition du décor en registres horizontaux, qui souligne la structure du vase, ainsi que la présence d’oiseaux vus de profil et de spirales carrées appelées leiwen sont également courantes à la fin des Shang.

Le motif de taotie, généralement constitué de deux profils d’animaux affrontés qui forment un masque vu de face et dépourvu de mâchoire inférieure, est remplacé ici par une interprétation exceptionnelle de cet élément. La présence d’une paire d’oreilles suggère en effet la figuration d’un visage humain, tandis que les ailes, de part et d’autre de ce dernier, ainsi que le nez protubérant rappellent la physionomie d’un oiseau. De telles hybridations entre homme et animal sont particulièrement rares sur les bronzes Shang et n’ont pas encore trouvé d’explication définitive. Il est cependant souvent avancé qu’il pourrait s’agir de la représentation d’un homme capable d’entrer en communication avec des esprits.

 

35. Fujikasa Satoko (née en 1980), Seisei (Plant growth)

Cette sculpture dynamique est réalisée à l’aide de l'argile de Hagi, ville traditionnellement associée aux ustensiles de la cérémonie du thé depuis le XVIIe siècle. Elle fait partie d’un ensemble de dix pièces dont les formes fluides sont créées à partir de maquettes basées sur une série de dessins préparatoires.

Le matériau adopté par l’artiste est très malléable et permet de donner aux céramiques des épaisseurs différentes, devenant extrêmement fines à mesure que la forme évolue vers le haut. Fujikasa Satoko s'efforce d'évoquer dans ces créations l'essence du ki, ou énergie vitale, qu'elle compare à la puissance d'un dragon en vol. Sa palette n’est constituée que d’une seule couleur, car elle estime que l'utilisation de l’argile blanche non émaillée permet à ses œuvres de mieux s'intégrer aux environnements dans lesquels elles sont exposées.

Remarquée dans les expositions nationales et internationales, Fujikasa Satoko a remporté le prix de la Biennale de céramique de Corée et ses œuvres sont entrées dans les collections de nombreux musées au Japon et dans le monde entier.

 

34. Paire de bouteilles fanghu

La bouteille hu 壺, apparue dans la typologie des bronzes rituels sous la dynastie des Zhou de l’Ouest (vers 1050-771 av. J.-C.), servait à contenir des céréales ou de l’alcool issu de leur fermentation. Ses angles pouvaient être vifs ou arrondis. Sous les Han de l’Ouest, la paire de substituts funéraires de fanghu, réalisée dans toutes sortes de matériaux, ne se rencontre alors plus seulement dans les sépultures de l’élite, mais également dans celles de gens du commun.

Ici, le décor de volutes nuageuses, inspiré de celui des laques, traduit la montée en puissance de croyances anciennes généralement qualifiées de taoïstes. Des vases funéraires, allant souvent par paire et renfermant parfois le même contenu, se rencontrent jusque sous la dynastie Ming (1368-1644). Cette pérennité est peut-être liée à la notion de germination et de potentielle renaissance commune à de nombreuses cultures.

 

33. Wang Tiande (né en 1960), Voyage immobile à Changzhou

Wang Tiande, auteur d’installations, de photographies et de calligraphies, est surtout connu aujourd’hui pour ses peintures à l’encre des deux dernières décennies.

Lors d’une résidence d’artiste à Paris, en 2002, il génère par inadvertance un trou dans une feuille de papier avec sa cigarette. Fasciné par le résultat, il produit depuis des paysages qui reprennent en partie ce principe, mais dont les compositions, sujets, motifs et effets de texture sont directement inspirés de la peinture des Ming (1368-1644) et des Qing (1644-1912).

Il commence par réaliser un premier paysage, peint à l’encre sur papier, puis le recouvre par une seconde feuille, marouflée sur la première et brûlée au moyen de cigarettes ou de bâtonnets d’encens afin de matérialiser les traits de contour des montagnes et des arbres. Les deux paysages superposés offrent une stratigraphie d’éléments traditionnels et contemporains. L’histoire multiséculaire de la peinture à l’encre constitue ainsi la base d’une nouvelle forme d’expression et reste toujours perceptible dans l’œuvre, à la manière d’un dessin sous-jacent.

Ce rapport entre présent, nourri par l’histoire, et passé, prolongé sous de nouvelles formes, est rendu plus explicite encore par l’insertion récente dans les compositions de Wang Tiande d’estampages d’inscriptions anciennes.

 

32. Qian Du (1763-1844), Paysage de neige

Les sommets enneigés de ce paysage surplombent un abri entouré de grands pins où un personnage solitaire se tient assis. La composition tire un parti très original de son format long et étroit : le massif compact formé par les pins est repris en hauteur par la silhouette des chaînes montagneuses.

Le poème calligraphié en haut à droite est d’une grande simplicité : il évoque la chaleur du poêle, l’odeur des légumes cuits et le fracas du vent dans les branches. En mentionnant ces éléments qui échappent au domaine du visuel, le poème prolonge la peinture.

Qian Du, originaire de la région de Hangzhou au Zhejiang, appartenait à une famille aisée où l’on cultivait l’art de la peinture. Au-delà de la collection familiale, les voyages ont nourri l’œuvre de Qian Du qui illustre la vitalité persistante de la vie culturelle et de la création artistique dans le centre sud de la Chine, à la veille des troubles de l’insurrection des Taiping.

 

31. Ornements de char

Ces deux pièces de char de l’époque des Zhou de l’Ouest répondent à une fonction précise dans la structure du véhicule : elles servaient à protéger la partie de l’essieu située entre la caisse du char et le moyeu de la roue.

Leur décor, formé par le profil en bas-relief d’un buffle muni d’une tête aux cornes saillantes et d’une patte avant recourbée, est extrêmement rare.

Il peut néanmoins être rapproché de ceux d’objets découverts sur le site de Zhuwajie (Pengzhou, Sichuan), en 1959 et 1980.

Les caches localisées sur ce site contenaient en effet des vases de grand format dont le décor intègre, de manière récurrente, ce motif de buffle, un élément caractéristique qui a permis aux archéologues d’attribuer ces réalisations à un même atelier, actif entre le Sichuan et le Hubei aux environs de l’an 1000 avant notre ère.

 

30. Plaque de ceinture : rapace attaquant un tigre

Cette plaque ajourée était autrefois fixée sur une lanière de cuir et ornait la poitrine d’un personnage de haut rang. Elle formait une paire avec une seconde plaque similaire, mais conçue en miroir, le tigre tourné vers la gauche.

Ce type de plaques de ceinture a été retrouvé dans quelques tombes et indique le rang social élevé du défunt. Les scènes de combat entre deux prédateurs comme ici, ou celles montrant un fauve, tigre, panthère ou loup, dévorant sa proie sont fréquentes. Le port d’une telle plaque a pu revêtir une fonction de protection dans la mort mais peut-être aussi du vivant du chef.

La culture des cavaliers nomades d’Eurasie était basée sur l’élevage. La protection des troupeaux contre les attaques des bêtes sauvages lors des transhumances saisonnières était nécessaire à la survie du clan. Le décor de ces plaques représente ainsi la violence de la nature sauvage, menace constante et spectacle fascinant.

 

29. Qi Baishi (1864-1957), La Pie

Qu’elles soient représentées isolées ou en groupe, les pies ont une signification bénéfique dans l’art chinois. La pie, xique 喜鵲 est en effet l’oiseau du « bonheur », xi . Il s’agit donc d’un motif extrêmement populaire qui fut traité par Qi Baishi de très nombreuses fois au long de sa longue carrière.

 

L’oiseau, perché sur une branche, est situé dans la partie supérieure de la peinture, il se penche vers le spectateur dans une attitude particulièrement expressive, propre aux créations des années de vieillesse de Qi Baishi.

 

L’originalité de la composition, l’énergie du pinceau et l’audace dans l’usage des couleurs caractérisent au plan formel les œuvres de cette période. Par ailleurs, la simplicité directe de cette peinture, son caractère rustique, ponctué d’humour sont emblématiques de l’univers pictural de Qi Baishi.

 

 

28. Élément de parure figurant un oiseau

Cet ornement en jade au profil d’oiseau est caractéristique du type de matériel exhumé des tombes de la fin de la période des Shang (vers 1600 – vers 1050 avant J.-C.). Par son fin décor incisé qui permet de détailler les ailes et la queue de l’animal, il se rapproche des créations de cette période, notamment de certaines pièces provenant de la tombe de la reine Fu Hao. Le traitement de la huppe en forme de double tête de hallebarde ge, en revanche, évoque davantage l’art de l’époque des Zhou de l’Ouest (vers 1050 – 771 avant J.-C.).

Par sa grande taille et sa qualité, cet ornement dénote une origine princière. Il faisait très probablement partie d’une importante parure pectorale. Principalement composés de jade, ces ensembles pouvaient également comporter des éléments en turquoise ou en cornaline.

 

27. Takamura Toyochika, Vase

Ce vase à la forme épurée et intemporelle est caractérisé par des jeux de couleurs de la patine allant du brun-rouge au vert, ce qui évoque la surface oxydée des anciens bronzes chinois. Sur la partie supérieure du corps composé de deux coques hémisphériques et souligné d’un joint se détachent quatre bourgeons floraux en relief. Ces éléments végétaux représentent le seul décor de cette pièce d’une élégance sobre et austère.

Né à Tōkyō en 1890, Takamura Toyochika est le troisième fils du célèbre sculpteur Takamura Kōun (1852-1934), réformateur de la sculpture japonaise à l’aube de l’époque moderne. Diplômé à l’École des Beaux-arts de Tōkyō en 1915, Toyochika s’associe à la société de bronziers du vase vert (Seikokai) et prend part à la création de mouvements innovateurs dans le domaine du travail du bronze. Élevé au rang de « Trésor national vivant » en 1964, il est particulièrement connu pour sa participation au mouvement Art déco au Japon.

 

26. Wen Boren (1502-1575), Bambous, arbre et rocher

Cet éventail est signé « Wu Feng », « Cinq pics », surnom du peintre Wen Boren. L’association d’un arbre, d’un rocher et de bambous est une iconographie devenue classique depuis l’époque des Song (960-1279). Néanmoins, Wen Boren insiste ici sur la verticale médiane que constitue le tronc, afin d’adapter ce sujet au format de l’éventail.

Certains traits de style, comme le rendu en feibai 飛白 du rocher ou la facture des bambous sont des réminiscences de peintures de l’époque des Yuan (1279-1368), en particulier de Zhao Mengfu (1254-1322). Par ailleurs, le rendu du feuillage de l’arbre à l’arrière-plan évoque le style de Wen Zhengming (1470-1559), oncle de l’artiste. Wen Boren est en effet l’héritier d’une tradition picturale familiale. Avec Wen Peng  (1498-1573) et Wen Jia (1501-1583), les fils de Wen Zhengming, il a largement contribué à la transmission du style de son oncle et au rayonnement de la célèbre école de Wu (Suzhou).

 

25. Gandharva jouant du pipa

Lors de sa diffusion en Extrême-Orient, le bouddhisme charrie avec lui des formes artistiques issues du monde indien. On voit ainsi se multiplier en Chine des lieux de culte creusés directement à flanc de montagne. Si ces sites de grottes excavées donnent l’impression d’une grande diversité iconographique, la répartition dans l’espace des différents types de personnages représentés répond à des règles presque immuables. Les principaux êtres vénérés, bouddhas ou bodhisattvas, sont placés face à l’entrée de la grotte et, parfois, dans des niches multipliées sur les parois. Au-dessus d’eux, mais aussi, en hauteur, de part et d’autre de l’entrée protégée par des gardiens de porte et sur le plafond sont régulièrement figurées des divinités en vol.

Ces danseuses et musiciens célestes soulignent l’importance des bouddhas et bodhisattvas qu’ils environnent. Par leur intégration au sein d’un décor sculpté et peint foisonnant, ils contribuent à transporter le fidèle hors de la matérialité du monde profane. La roche granuleuse de cette œuvre, le dynamisme de la pose, le faible relief et le traitement des plis du vêtement en vagues concentriques laissent supposer que ce gandharva ornait autrefois le site de Yungang, au Shanxi. Son style est notamment très proche de celui des danseuses célestes de la grotte n° 6 creusée entre les années 470 et 494.

 

24. Élément de char anthropomorphe

Cet objet tubulaire est orné sur ses deux faces d’un visage ou d’un masque stylisé. Celui constitué de deux yeux proéminents sous de larges sourcils, de part et d’autre d’une arête nasale marquée, évoque la représentation d’un homme ou d’un être hybride à mi-chemin entre l’homme et le taotie, ici rappelé par les éléments spiralés à son sommet. La figure humaine fait partie du répertoire des bronziers Shang et Zhou. Elle reste toutefois assez rare et ses éventuelles significations, qui font l’objet de multiples conjectures, sont susceptibles de varier selon la nature des bronzes et les iconographies.

Malheureusement, bien que plusieurs objets du type de celui du musée Cernuschi soient répertoriés dans des collections publiques ou privées, leur fonction exacte reste en partie hypothétique. La découverte d’un bronze comparable dans une fosse à char de Baoji, au Shaanxi, permet simplement de supposer qu’il s’agit d’embouts venant orner un élément de char, probablement le timon à en juger par le diamètre intérieur des pièces. Des traces minéralisées sur le sommet du bronze du musée suggèrent qu’il était au contact d’une vannerie au moment de son enfouissement.

 

23. Kishi Renzan (1805-1859), Aigle sur un pin enneigé

Sur un ciel hivernal chargé d’humidité se détache un pin vigoureux dont on ne voit qu’une partie, l’observateur étant invité à imaginer son sommet, sa base et le reste de l’image. Au premier plan, un aigle perché sur le tronc est dépeint de manière réaliste, notamment son plumage rendu par un usage savant de l’encre diluée et nuancée en fines gradations allant du gris perle au noir foncé, tandis que quelques taches de jaune animent son bec et son œil. Son regard scrutateur trace une diagonale qui fait écho à la branche du dessous et à celle du paravent de droite, accentuant ainsi l’aspect dramatique de la scène.

Fils adoptif et gendre de Kishi Ganku (1749-1838) - le fondateur de l’école Kishi, devenu célèbre pour ses peintures de tigres -, Renzan se spécialise dans la peinture de « fleurs et oiseaux » (kachōga). Il a décoré dans ce genre les portes coulissantes (fusuma) de la « Salle des Oies sauvages » du palais impérial de Kyōto.

 

22. Ornement de harnachement

Cet ornement, dont l’effet décoratif était rehaussé par la dorure, est constitué de l’assemblage de trois éléments : un disque concave percé d’un trou, un médaillon qui s’y insère, et un passant qui se greffe sur ce dernier.

Le motif central figure un ours vu de face en raccourci. Le traitement stylisé du pelage, par filets en relief successifs, se veut une évocation de l’art animalier de l’empire xiongnu 匈奴. Cette puissante confédération de peuples de pasteurs domina la partie orientale de la steppe eurasiatique entre le IIIe siècle av. J.-C. et la fin du Ier siècle de notre ère.

Le « style xiongnu » connu une grande vogue dans l’empire des Han de l’Ouest, en particulier le thème de l’ours, et plus précisément celui de l’ours brun ursus arctos (xiongpi 熊羆). Comme au sein de très nombreuses cultures sur son ère de répartition, c’est sans doute sa capacité à se dresser comme un être humain qui semble avoir fasciné, ce qui lui vaut d’être aussi appelé ours-humain, renpi 人羆 en chinois.

 

21. Zhang Yin (1761-1829), Solitaire sous les pins contemplant les vagues

Zhang Yin est considéré comme le plus éminent représentant d’un groupe de peintres qui exercent dans la ville de Zhenjiang (anciennement Jingjiang), au Jiangsu, entre la fin du XVIIIe siècle et la première guerre de l’opium (1839-1842). Issu d’une famille riche en relation avec des intellectuels et des artistes, Zhang Yin entre en contact avec le calligraphe Wang Wenzhi (1730-1802) et le peintre Pan Gongshou (1741-1794). Ce dernier le familiarise avec le vocabulaire pictural de l’école de Wu. Toutefois, alors que Pan Gongshou se réclame particulièrement de Shen Zhou (1427-1509), Zhang Yin puise son inspiration chez Wen Zhengming (1470-1559). En témoigne ici la méticulosité du rendu des feuillages et des vagues ainsi que l’emploi des couleurs.

Les productions de Nanjing du début de la dynastie Qing (1644-1912) exercent également une influence marquée sur les artistes de Zhenjiang. Zhang Yin pourrait d’ailleurs leur avoir emprunté la composition et le principe de la description d’une large étendue d’eau mouvementée, même s’il est tentant de voir dans ce motif un écho de son expérience personnelle, sa famille ayant été ruinée par une inondation. Le poème et la présence de l’homme qui contemple le panorama subliment ce sujet, qui devient, par contraste, une évocation du calme des retraites en montagne.

 

20. Guerrier à cheval

Le cavalier, réduit à la partie supérieure du corps, porte la coiffe wubian 武弁 dévolue, sous la dynastie Han (206 av. J.-C. - 220), aux simples soldats. Son bassin se fond avec la selle de manière à s’emboîter sur le dos du cheval. Les détails de son vêtement sont en grande partie effacés mais l’on distingue toutefois, le col d’une tunique extérieure souligné de rouge et celui d’un vêtement de dessous.

Cinq cavités, ménagées dans le corps du cheval, permettent d’y insérer les jambes et la queue aujourd’hui disparue. La tête de l’animal est prise dans une bride peinte en rouge dont le cavalier semble avoir tenu les rênes. La représentation du harnachement est proche de celle des montures de guerriers exhumés à Yangjiawan 楊家灣 près de Xi’an 西安 (Shaanxi). Ces derniers pourraient remonter au premier quart du IIe siècle av. J.-C.

Le traitement simplifié du guerrier, privé de jambes, suggère toutefois une datation plus tardive. En effet, une pièce comparable a été trouvée dans une tombe postérieure à 118 av. J.-C. située sur la butte Jinqueshan (Shandong).

Ces guerriers devaient garantir la sécurité du défunt et chasser les influx néfastes du tombeau.

 

19. Oda Shitsuhitsu (1779-1832), Cerisier en fleur

Cette œuvre à la composition très puissante est emblématique du style d'Oda Shitsuhitsu. Il s’agit d’une vue en gros plan (taiga) d’un tronc de cerisier en fleur, dont ni le sommet ni la base ne sont visibles, se détachant en dessinant un S sur le support en soie. Son écorce est obtenue à l’aide de traits de pinceau larges et semi-circulaires, sans tracé préliminaire, se servant d’une encre parfois plus dense parfois plus légère, ce qui confère de la profondeur au motif. Le rendu naturaliste est accentué par l’usage ponctuel de vert malachite, destiné à évoquer la présence de lichens.

Spécialisée dans les peintures de fleurs, l’artiste possède un sens du détail et de l'observation botanique qui la situent dans un courant pictural réaliste où l'influence occidentale est perceptible. Oda Shitsuhitsu est l'une des rares peintres femmes qui se sont affirmées à l'époque Edo. Descendante d'Oda Nobusada, neuvième fils du chef militaire Oda Nobunaga (1534-1582), réunificateur du Japon, grand amateur d'art et mécène, elle embrasse la carrière de peintre vers 1796 en devenant l'élève de Mikuma Rokō, elle-même artiste peintre de talent.

 

18. Coupe, culture de Longshan

La culture de Longshan 龍山 s’est développée sur le cours inférieur puis central du Fleuve Jaune à partir du milieu du troisième millénaire avant J.-C. Elle fut découverte dans les années 1930.

De par ses parois extrêmement minces, tournées dans une argile homogène minutieusement préparée, cette coupe, noircie par enfumage lors de la cuisson, puis soigneusement polie, appartient au mobilier funéraire de prestige.

Son profil net, au pied anguleux, se rapproche de celui d’une coupe plus élancée, exhumée du site de Chengzi 呈子 au sud-est du Shandong. Ces deux coupes sont représentatives du stade initial du développement des coupes sur pied allongé de la culture de Longshan nées de celles créées par la culture de Dawenkou 大汶口 (vers 4100-2600 av. J.-C. environ).

Ces coupes fragiles étaient réservées aux funérailles et enfouies avec le défunt. Il est maintenant avéré que certaines d’entre elles ont contenu de l’alcool et auraient pu servir lors de banquets funéraires ou de libations sur la tombe.

 

17. Wen Zhengming (1470-1559), Calligraphie

Wen Zhengming est une figure majeure de l’histoire de l’art chinois. Il vécut sous la dynastie Ming (1368-1644). Conformément à l’idéal des lettrés de son temps, il est à la fois auteur de peintures, et de calligraphies. Il a également laissé de nombreuses œuvres poétiques.

Cet éventail est l’expression du talent du poète aussi bien que de l’élégance du calligraphe. En quelques vers, Wen Zhengming esquisse un paysage printanier. Au sein d’une éruption de couleurs, de la pluie et du vent porteur de parfums, une beauté s’éveille « tandis qu’un papillon franchit le mur en voltigeant ». La virtuosité contenue de la calligraphie semi-cursive s’accorde parfaitement à cette évocation poétique.

En Chine, les éventails sont l’un des supports classiques de la calligraphie et de la peinture. Dès la dynastie Song (960-1279), l’éventail rond est un format couramment utilisé par les peintres. Les éventails pliants, originaires du Japon, ont été adoptés par les lettrés chinois sous les Ming (1368-1644). Les éventails peints ou calligraphiés, souvent offert en gages d’amitié, jouent un rôle important dans la sociabilité des élites de cette époque.

 

16. Plat Jun

Les grès aujourd’hui désignés par le vocable de Jun, des pièces robustes revêtues d’une épaisse couverte opaque bleutée, ne furent inclus que tardivement au « panthéon des céramiques chinoises », entre le XVIe et la première moitié du XVIIe siècle. La production de ces objets de la vie quotidienne, destinés à une large diffusion débuta au Henan au XIIe siècle, peut-être à la fin de la dynastie des Song du Nord (960-1127), plus sûrement au début des Jin (1115-1234).

La couleur bleutée de la couverte est produite par le passage de la lumière à travers le revêtement de texture riche et onctueuse. Sur le plat du musée, trois rehauts violacés nés de paillettes d’oxyde de cuivre, irriguent le revêtement. Celui-ci recouvre le tesson beige orangé jusqu’au-dessus du pied où il dessine une ligne très irrégulière. Son rebord inférieur est marqué de traces de pernettes, liées au mode d’enfournement classique de ces céramiques. Ce plat a fait l’objet d’une restauration au laque d’or selon la technique japonaise du kintsugi.

 

15. Suivante Han

Ce substitut funéraire (yong 俑) féminin de grande taille, se distingue par son port élégant. Si l’on se réfère aux sources antiques et médiévales, le caractère yong était réservé, à l’origine, aux statuettes funéraires anthropomorphes.

Sous le voile formé par la terre d’enfouissement, on devine une longue robe dont le pan gauche (le principal) s’enroule autour du pan droit tout en diminuant progressivement de largeur (quju 曲裾). Cette coupe, héritée de l’époque des Royaumes Combattants (453-222 av. J.-C.), était, sous la dynastie des Han de l’Ouest, surtout utilisée pour les vêtements de cérémonie.

Trois des perforations visibles sur l’avers étaient destinées à des accessoires : épingles à cheveux et agrafe, à droite du buste. Elle tenait dans les mains, dissimulées dans les manches par politesse, un élément aujourd’hui disparu.

La coupe de la robe, similaire à celle que portait le corps de la marquise de Dai 軑 (décédée entre, environ, 168 et 145 av. J.-C.), invite à attribuer cette sculpture à la 1ére moitié du IIème siècle av. J.-C.

 

14. Jin Kun (actif de 1717 à 1749), Sun Hu (actif de 1728 à 1746), Lu Zhan, Wu Yu, Zhang Qi, Cheng Liang, L’Académie Hanlin

Cette peinture fut créée pour commémorer le banquet donné par l’empereur Qianlong en 1744, à l’occasion de la rénovation architecturale de l’Académie Hanlin, l’une des institutions fondamentales de la Chine impériale.

Les calligraphies qui ornent la composition sont l’œuvre de trois hauts fonctionnaires qui ont transcrit les poésies composées au cours de cette journée festive. La peinture a, quant à elle, nécessité l’intervention de six artistes, tous membres de l’Académie impériale de peinture. Au sein de cette production de cour, l’œuvre se distingue par son format monumental et sa perspective complexe.

L’Académie Hanlin se situait à proximité du palais impérial et de la porte Tian an men, visible en haut à gauche de la peinture. Cette œuvre est sans doute l’image la plus fidèle de cet ensemble architectural aujourd’hui disparu, l’académie ayant été largement détruite pendant la guerre des Boxers.

 

Le majestueux rouleau de l’Académie Hanlin peut être consulté en haute définition, sur l’écran tactile qui fait face à la salle de peinture du musée (section 12 du parcours : Dynastie Qing). Vous êtes invités à parcourir l'œuvre, décryptée en une douzaine de points d'intérêts, en mode libre ou en mode guidé.

 

13. Plat à décor taoïste

Ce plat, réalisé au moule, est dressé dans un tesson blanc et translucide de texture fine. Il est revêtu d’une couverte transparente et brillante d’un bleu céruléen, à l’exception de la base.

Comme souvent en céramique, la forme s’inspire ici du métal. Le marli plat, bordé sur la lèvre d’un filet en relief, est orné d’une double rangée de pétales de lotus. Il s’articule au cavetto godronné par un angle droit. Ce modèle a également été utilisé par les fours de Ding dans la Chine du Nord alors dominée par les Jurchens de la dynastie Jin (1115-1234).

Le décor imprimé sur le médaillon central est une allégorie taoïste de l’alchimie interne (neidan), ensemble de pratiques visant à accroître la longévité et à parvenir à la délivrance finale. Pin, grue, tortue et pèches sont des symboles classiques de longue vie. L’iconographie taoïste, plutôt rare à Jingdezhen à cette époque, est en revanche très présente sur le revers des miroirs en bronze contemporains. Elle y reflète la vitalité foisonnante de cette religion au sein de la population.

 

12. Lee Bae, Issu du feu – Pa 49

À ses débuts, dans les années 1980, Lee Bae pratique une peinture qui s’inscrit dans la lignée de la bad painting américaine et d’une forme de néo-expressionnisme international. C’est à son arrivée à Paris, en 1989, qu’il modifie radicalement son style et ses techniques. Des contraintes économiques ainsi que le besoin de conserver un lien fort avec sa culture d’origine l’amènent en effet à choisir le charbon comme principal outil de création. Ce dernier ravive chez lui le souvenir de son usage courant et symbolique en Corée et lui semble relever du même univers que l’encre de Chine, obtenue à partir de la suie.

Employé dans un premier temps tel un fusain, le charbon est d’abord mis en œuvre dans des compositions qui prolongent le travail antérieur. Toutefois, la figuration devient bientôt inutile face à la force d’évocation de la matière et les effets qu'elle permet. Lee Bae explore ainsi son potentiel plastique dans de multiples toiles abstraites de la seconde moitié des années 1990. Il emploie également à partir de la fin de cette décennie des charbons collés sur toute la surface du support avant d’être poncés. Leur poussière, mêlée au médium acrylique, remplit complètement les interstices de la composition et met en valeur, par sa tonalité mate, les irisations chatoyantes des morceaux de carbone polis.

 

 

11. Emblème

Si cette plaque ajourée frappe par le caractère schématique et puissant de l’animal de profil, gueule grande ouverte, c’est sa rareté qui en fait à la fois l’intérêt et la complexité interprétative. Faute d’objet similaire retrouvé en un contexte archéologique aisément interprétable, sa signification et sa fonction doivent être déduits, autant que possible, de son observation. Le seul indice quant à son utilisation est la douille à sa base, qui servait à l’emmancher, ainsi que les œillets permettant le passage de liens ou l’accroche d’ornements mobiles. Des bronzes tels que la lame de hallebarde cérémonielle du Metropolitan Museum pourraient également fournir des indications quant à son utilité.

Celle-ci est de toute évidence plus symbolique que pratique. Faute de pouvoir assigner à cette plaque une fonction matérielle identifiée, voir en elle un emblème, possiblement fixé à un char ou à une hampe pour être utilisé à la manière d’une oriflamme, apparaît comme l’hypothèse la plus probable. Dans ce cadre, l’animal représenté ici pourrait être la marque d’un clan. Les arêtes dorsales et les pattes griffues inciteraient à identifier ce motif comme un dragon kui, créature omniprésente sur les bronzes des Shang (vers 1600 – vers 1050 av. J.-C.) et des Zhou.

 

 

10. Objet funéraire en forme d'oie

Les premiers objets ansériformes ne semblent apparaître qu’à l’époque de Jizhao 姬釗, le roi Kang 康 de Zhou (? - 996 av. J.-C.). Il s’agit de zun, des vases rituels destinés à contenir de l’alcool de céréales. Le rendu de ces oiseaux ne recherche nullement le réalisme.

Par la suite, les fonctions des objets ansériformes se diversifient : ainsi, dans la fosse d’accompagnement K0007 du tombeau du Premier Empereur 始皇帝 (r. 221 - 210 av. J.-C.), avait été agencée l’évocation, peut-être magique, d’un cours d’eau peuplé de grues, cygnes et oies cygnoïdes en bronze, grandeur nature, et de facture réaliste.

Plusieurs lampes de bronze en forme d’oie tenant dans son bec un poisson ont été exhumées de tombes datant du Ier siècle av. J.-C. Elles exprimaient, peut-être des vœux de prospérité puisque les caractères signifiant « poisson » et « excédent » sont homophones en chinois.

Il faut par ailleurs noter l’existence de contenants en forme de bouteille hu à col en forme d’oie datés de la même période. Certains de ces objets présentent une proximité de facture remarquable avec l’oie du musée Cernuschi.

 

 

9. Fu Baoshi (1904-1965), Paysage fluvial, 1956

Fu Baoshi est né à Nanchang, dans la province du Jiangxi. Largement autodidacte, il signe ses premières peintures en 1925. Les recherches picturales de ses jeunes années le conduisent au Japon où il poursuit ses études de 1933 à 1936. Elles se focalisent alors sur les œuvres de Gu Kaizhi (344- 406) et de Shitao (1642-1707). De retour en Chine peu avant le début de la guerre, il trouve refuge à Chongqing où il séjourne de 1939 à 1945. Durant cette période, on assiste à l’émergence spectaculaire de son style personnel.

Après la révolution de 1949, il réalise plusieurs peintures sur des thèmes poétiques empruntés aux œuvres de Mao Zedong (1893-1976). Durant ses dernières années, le travail de Fu Baoshi est caractérisé par une évolution de sa palette, ainsi que par le travail sur le motif : les créations réalisées lors de ses voyages en Roumanie et en République tchèque en 1957 sont représentatives de cette évolution.

L’histoire de ce paysage fluvial s’inscrit précisément dans le contexte de ces échanges puisqu’elle avait été offerte par l’auteur à l’historien de l’art asiatique tchèque Lubor Hájek (1921-2000), avant de rejoindre les collections du musée. En représentant les rives d’un vaste fleuve où naviguent des bateaux à voile, Fu Baoshi illustre l’un de ses thèmes de prédilection.

S’il a souvent dépeint ce sujet pendant la guerre, comme le montre la Tempête du musée Cernuschi, un détail permet de dater cette œuvre des premières années qui suivent la révolution de 1949 : il s’agit d’un drapeau rouge qui émerge des arbres au premier plan. Cette peinture, donnée en 1967, est la première œuvre contemporaine offerte par la SAMC au musée Cernuschi.

 

 

8. Exorciste

Ce guerrier, brandissant une lance aujourd’hui disparue, est un fangxiangshi 方相氏 : un exorciste. Cette fonction aurait été instituée par le légendaire Empereur Jaune. Chargés des exorcismes saisonniers et funéraires, ces experts étaient, d’après le Rites des Zhou 周禮 compilé à l’époque des Royaumes Combattants (453-222 av. J.-C.), sous la direction du vice-ministre de la guerre sima 司馬.

Sous la dynastie des Jin de l’Ouest (265-316), un substitut funéraire remplissant cette tâche était placé à l’entrée de la chambre funéraire, formant généralement un binôme avec un animal fantastique chargé de subjuguer les esprits malins.

Vêtu d’une armure aux manches tubulaires tongxiukai 筩袖鎧, timidement apparue à la fin des Han de l’Ouest (25-220), protégé d’un casque et d’un bouclier ici disparu, l’exorciste du musée adopte l’iconographie usuelle de ce personnage. Quelques détails sont néanmoins curieux : l’armure se ferme sur le plastron et non sur la dossière et, au lieu d’afficher un rictus menaçant le visage s’éclaire d’un sourire. Peut-être est-il influencé en cela par la statuaire du Bouddhisme, connu en Chine dès le milieu du Ier siècle.

 

 

7. Vase gui

Le passage de l’époque des Shang (vers 1600 - vers 1050 avant notre ère) à l’époque des Zhou (vers 1050 - 256 avant notre ère) est porteur de conséquences politiques et sociales. Alors que le roi Shang détenait son pouvoir d’un monopole rituel, celui des Zhou doit le sien à une coalition de clans qui lui ont permis de renverser la dynastie précédente. Les cadres intellectuels et religieux semblent cependant n’évoluer que marginalement dans un premier temps.

Il faut attendre le milieu du IXe siècle avant notre ère pour constater une modification des rituels, révélée par l’évolution des ensembles archéologiques dans les tombes ainsi que par les changements de forme et de décor des bronzes.

Dorénavant, les vases gui figurent toujours en nombre pair dans la sépulture, tandis que les ding sont en nombre impair. Les complexes décors Shang sont remplacés par des motifs rubanés géométriques et répétitifs ou des entrelacs, dérivés d’entremêlements de dragons stylisés.

Seules les anses de ce gui, destiné à contenir des aliments, rappellent encore clairement le vocabulaire animalier antérieur. Les trois caractères au fond du récipient indiquent le nom du clan auquel il appartenait.

 

 

6. Yokoyama Taikan (1868-1958), Li Bai admirant une cascade, 1902

Cette œuvre illustre le poème Vue d’une cascade du mont Lushan composé par Li Bai (701-762), célèbre poète de la dynastie Tang (618-907), dont les mots évoquent son admiration face à un superbe paysage : Sous les rayons du soleil, une fumée pourpre monte du brûle-parfum / De loin je contemple la cascade suspendue au-delà du fleuve / De trois mille pieds, rapide, elle se jette et descend, droite comme une flèche / On dirait la Voie lactée tombant du neuvième ciel.

Ici le poète, enveloppé dans un habit bleu clair, seule couleur intense d’une palette volontairement sobre, est assis sur un rocher plongé dans un état contemplatif de fusion avec la nature.

Considéré comme l’un des représentants majeurs du mouvement Nihonga ("peinture japonaise"), Yokohama Taikan étudie auprès de Kanō Hōgai (1828-1888), dernier maître de l’école officielle Kanō. En 1889, il fait partie de la première promotion d’artistes de l’École des Beaux-Arts de Tōkyō, où il apprend à renouveler la peinture traditionnelle japonaise en lui intégrant des éléments de la peinture occidentale.

 

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5. Sogdien au rython, VIIe siècle

Cette figurine de taille exceptionnelle aux traits volontairement accentués est une aimable caricature d’un "Barbare" d’Asie Centrale.

Son bonnet, bordé de fourrure est propre aux États sogdiens de Transoxiane (entre l’Amu-Daria et le Syr-Daria). Il tient de la main droite un rhyton déformé. Emprunté à la Perse achéménide (vers 559-330 av. J.-C.), ce récipient, dérivé de la corne à boire, s’était répandu dans tout l’empire hellénistique (323-31 av. J.-C.).

Les Sogdiens, particulièrement actifs en Chine du Nord entre le milieu du VIe et le milieu du VIIIe siècle, y maîtrisaient jalousement toute la filière vinicole.

Ce personnage fait partie d’un groupe de substituts funéraires réalisés en Chine du Nord et exhumés de tombes datées entre 643 et 664.

 

 

4. Qi Baishi (1864-1957), "Deux pommes", XXe siècle

Qi Baishi est un des plus importants peintres chinois du XXe siècle. Issu d’un milieu populaire du Hunan, il travaille dans un premier temps comme charpentier et se forme à la peinture en grande partie en autodidacte. Dès les années 1890, il commence à devenir connu dans sa région pour ses talents picturaux. Sa carrière de peintre et de graveur de sceaux ne prend toutefois son envol qu’après son installation définitive à Pékin en 1917 et une exposition organisée au Japon en 1922. Sa célébrité, son parcours personnel et son refus de vendre des œuvres à des mécènes japonais après 1937 lui octroient une aura exceptionnelle au sein de la scène artistique de la période maoïste.

Ces deux pommes sont représentatives du style pour lequel Qi Baishi est devenu célèbre. Particulièrement admiratif des travaux de Badashanren (1626-1705), il privilégie des sujets animaliers ou végétaux, qu’il réalise d’un style simple et puissant, construisant ses formes et transcrivant les volumes au moyen de lavis. La vivacité des couleurs rappelle, quant à elle, le travail de Wu Changshuo (1844-1927).

La peinture fut achetée par la Société des Amis du musée lors de la dispersion de la collection de Zhou Lin, ancien Président de l’Association des artistes chinois en France et directeur des éditions Euros, qui ont publié nombre de catalogues du musée Cernuschi.

 

 

3. Ours

Cet ours en bronze doré à la physionomie expressive se distingue par sa taille, exceptionnelle pour une pièce d’orfèvrerie chinoise antique. S’il s’agit certainement d’une pièce usuelle, sa fonction reste difficile à déterminer.

Toutefois, la présence d’un tenon horizontal au dos de la pièce permet de supposer que l’ours servait de soutien à un objet de taille relativement grande, comme un paravent.

Associée à l’immortalité, la figure de l’ours est un élément caractéristique du vocabulaire décoratif utilisé dans le mobilier funéraire de l’époque des Han. L’apparition de ce motif correspond au règne de l’empereur Han Wudi (140-87 avant J.-C.). Dès cette époque, ce motif animalier est attaché à la fonction de support, comme l’atteste le célèbre chaudron tripode aux pieds en forme d’ours retrouvé dans la tombe du prince Liu Sheng découverte à Mancheng, en 1968.

 

 

2. Linteau à décor de frise d'animaux et d'immortel

Les tombes Han étaient ornées de multiples décors figurés sur des briques creuses estampées, des peintures murales ou des reliefs gravés. Les motifs de ce linteau ou de cette architrave appartiennent ainsi à un programme iconographique dont les significations devraient être étudiées à l’échelle du complexe funéraire auquel la pièce appartenait.

Malheureusement, la provenance de cet élément sculpté reste aujourd’hui inconnue. Les frises d’animaux réels et fantastiques ainsi que les représentations d’hommes ailés, dont les traits hybrides caractérisent alors les figurations d’immortels, sont toutefois suffisamment fréquentes dans le mobilier funéraire Han pour pouvoir restituer une partie du sens de cet objet. En effet, si ces motifs ne peuvent être rattachés à un texte en particulier, ils sont l’expression de croyances relatives à une forme d’immortalité ou à une vie après la mort.

Ces croyances sont souvent évoquées sur les dessus de porte et de passage dans les tombes. À une époque où le taoïsme n’existe pas encore en tant que religion constituée et où le bouddhisme commence tout juste à se diffuser en Chine, elles sont susceptibles d’être exprimées au moyen d’une iconographie foisonnante, qui puise sans exclusive à de multiples sources.

 

 

1. Oreiller à la pie

Sous la dynastie Jin, fondée par les Jurchen, le répertoire décoratif des céramiques fait une large place aux motifs végétaux et animaliers rendus avec un certain réalisme. Les décors peints des grès de Cizhou illustrent bien cette tendance, en particulier ceux produits durant les décennies prospères du tournant du XIIIe s. Cet oreiller octogonal, réalisé par moulage et assemblage à la barbotine, cache, sous un engobe blanc cassé à base, un tesson gris-beige. Celui-ci, bien que très proche du corps des porcelaines blanches du nord de la Chine, présente toutefois un taux supérieur d’agents colorants, notamment d’oxyde de fer.

Le décor soigné a été tracé au pinceau grâce à un engobe brun chargé d’oxyde de fer magnétique. Cette technique ornementale, d’abord expérimentée au sein des officines de Guantai et Hebiji à partir du début du XIIe s. devint bientôt prépondérante.

Après application du décor, les objets étaient revêtus d’une couverte transparente dont la viscosité, alliée à la stabilité de l’oxyde de fer magnétique contribuaient à la grande lisibilité du décor. Celui-ci est composé, sur les côtés de l’oreiller, d’un rinceau végétal stylisé qui fait partie du répertoire commun de nombreux fours du groupe Cizhou, et, sur le plat d’une pie perchée sur un rameau dénudé. Ce thème, issu du genre pictural "fleurs et oiseaux", fait partie des sujets animaliers favoris des grès peints de Cizhou. La pie, xique, est considérée comme un oiseau de bon augure en raison du premier caractère de son nom qui signifie "joie". Ici, son rendu entre naturel et simplicité, est un écho modeste des œuvres des grands maîtres Song tels que Cui Bai 崔白 (1004-1088) ou Ma Lin 馬麟 (fin XII-début XIIIe s.).

La Société des Amis du musée Cernuschi

Fondée en 1922 et reconnue d‘intérêt public depuis 1986, la Société des Amis du musée Cernuschi (SAMC) a pour but d’enrichir les collections du musée Cernuschi, musée des arts de l’Asie de la ville de Paris, par une recherche active de mécénat et de promouvoir la connaissance des arts et des cultures asiatiques par l’organisation de conférences mensuelles et de visites-conférences d’expositions. Dès le début du XXe siècle, la Société des Amis du musée Cernuschi contribue au mouvement de redécouverte de l’Asie ancienne par des acquisitions majeures dans le domaine de l’archéologie chinoise. Parallèlement, le musée et la Société des Amis jouent un rôle de pionniers auprès des artistes asiatiques actifs à Paris et font entrer dans les collections permanentes des œuvres modernes et contemporaines en provenance de Chine, de Corée, du Japon et du Vietnam.

Plus d'informations sur la SAMC ici : amis-musee-cernuschi.org

Adoptez une œuvre ! Contribuez au retour des Dragons sculptés du musée Cernuschi

La Société des Amis du musée Cernuschi lance une campagne de mécénat participatif pour restaurer un élément d'architecture japonais exceptionnel : deux panneaux en bois sculpté représentant des dragons, d'une longueur de douze mètres. Offerte à Henri Cernuschi par Sosthène Paul de Turenne, un des premiers diplomates français au Japon, cette pièce était accrochée en hauteur derrière le grand Bouddha dans la grande salle du premier étage de son hôtel particulier construit pour exposer les quelques 5000 œuvres acquises en Chine et au Japon, lors de son grand voyage en Asie de 1871 à 1873.

La restauration de la longue frise des dragons replacée à l’endroit choisi par Henri Cernuschi rendrait à la salle du Bouddha (salle Kwok) toute sa magnificence.

Plus d'informations sur la campagne ici : Adopter une œuvre