Li Jin, Le Vrai Corps

LI Jin 李津 (né en 1958)
Le Vrai Corps (Zhenshen) 真身, 1993
Encre et couleurs sur papier
H.137 cm ; L.69 cm
Achat, 2016

M.C. 2016-67

Li Jin (né en 1958) est un acteur majeur du développement en Chine d’une nouvelle peinture de lettrés à partir des années 1980. Diplômé de l’université des beaux-arts de Tianjin en 1983, il revivifie et renouvelle, par le choix d’un style souvent naïf et par des iconographies contemporaines volontiers érotiques, la tradition d’une certaine peinture lettrée, celle des grands maîtres excentriques de l’histoire de la peinture chinoise.

Cette réappropriation et réinterprétation d’un passé pictural s’accomplit toutefois selon des voies partiellement balisées par des artistes occidentaux. Le primitivisme de Gauguin (1848-1903) et de Van Gogh (1853-1890) ainsi que la recherche d’une harmonie avec la nature, incitent Li Jin à effectuer deux voyages au Tibet en 1984-1985 et en 1990. Il y est bouleversé par le rituel de l’inhumation céleste, lors duquel les corps des défunts sont exposés en pleine nature pour les livrer à l’appétit des vautours. Cette scène lui fait l’effet d’une révélation spirituelle et l’incite dès lors à voir dans le monde ainsi que dans la peinture un jeu et un processus.

Le corps squelettique, quoique encore orné de chairs rouges, est ici une référence directe aux iconographies de l’art tibétain. Le titre de l’œuvre lui-même, Le Vrai Corps (Zhenshen 真身), peut d’ailleurs faire référence, entre autres significations, à la pratique de la momification des corps des saints dans le lamaïsme. Toutefois, si les calligraphies superposées à la manière d’un palimpseste transcrivent l’expérience d’une culture matérielle tibétaine saturée et patinée par le passage du temps, elles rappellent aussi l’importance de l’écrit parmi les valeurs des lettrés et témoignent d’un goût pour un travail de texturation à l’encre issu de la pratique de l’estampage.

Référence(s) : Arts Asiatiques, t.72, 2017, p.136-137
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