Vu Cao Dam, Portrait d'un lettré

Vu Cao Dam [武高談Vũ Cao Đàm] (1908-2000)

Paris, 1939
Couleurs sur soie marouflée sur carton
Centre national des arts plastiques
En dépôt au musée Cernuschi depuis 2024

No FNAC 16219

Vu Cao Dam est issu d’une famille de lettrés de confession catholique originaires du Tonkin. Son père Vũ Đình Thi (1864-1930) était un érudit versé à la fois dans les études chinoises et françaises. Pendant ses jeunes années, Vu Cao Dam suit l’enseignement d’un maître qui lui apprend les arts martiaux et les caractères chinois, puis à l’âge de dix ans, il entre à l’école des Frères des écoles chrétiennes. Son goût pour le dessin l’incite à se porter candidat lorsque l’École des beaux-arts de l’Indochine ouvre en 1925 à Hanoï. Il manque de peu l’admission mais est autorisé à suivre les cours avec les lauréats afin d’être en mesure de réussir à l’examen de l’année suivante. Vu Cao Dam suit les cours pendant cinq ans, de 1926 à 1931, et se spécialise alors en sculpture. Il sort premier de sa promotion et obtient une bourse pour poursuivre ses études en métropole. Il arrive à Paris en décembre 1931, sans savoir alors qu’il restera définitivement en France pour le reste de sa vie.
Vu Cao Dam reçoit des commandes de portraits en buste qui lui permettent de rester à Paris après avoir terminé ses études à l’École du Louvre. Mais bientôt, la seule vente de ses sculptures ne suffit plus et il se met à peindre sur soie. Ce support d’origine asiatique plait particulièrement à une clientèle occidentale avide d’exotisme. Jusque dans les années 1950, la soie sera son moyen d’expression privilégié.
Vu Cao a peint plusieurs portraits de lettrés, revisitant ainsi le genre du portrait d’ancêtre. Hérité de la Chine, le portrait d’ancêtre obéit à des codes stricts : le sujet hiératique est représenté frontalement, assis sur un siège. Monté en rouleau, il était suspendu au-dessus de l’autel familial où les ancêtres étaient honorés. Le genre est revisité par la nouvelle école indochinoise qui en reprend les codes, mais adopte le nouveau format occidental, rigide et encadré. La fonction cultuelle est évacuée, les personnages étant désormais anonymes. Pourtant, la permanence de ces pseudo portraits d’ancêtre illustre la volonté d’inclure l’héritage pictural vietnamien dans le renouveau de l’art.
Peut-être peut-on voir dans le visage émacié et les sourcils tombant du vieil homme une réminiscence autant qu’un hommage à son père Vũ Đình Thi. Grâce à son excellente maîtrise du français, Vũ Đình Thi fut choisi pour accompagner la délégation vietnamienne représentant l’Annam lors de l’Exposition universelle de Paris en 1889. De son long séjour de près d’une année, il garda le goût de la culture française qu’il transmettra à ses enfants. Il ouvrira par la suite une école privée formant des interprètes vietnamien-français.

Portrait d'un lettré
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