Zhang Daqian, "Ermite dans la forêt"

ZHANG Daqian 張大千 (1899-1983)
Ermite dans la forêt, 1945
Encre et couleurs sur papier
H.217,4 cm ; L.82,8 cm
Don Guo Youshou, 1953

M.C. 8710

Inscription et signature : 少有道氣,終興俗違。亂山喬木,碧苔芳暉。乙西七月初三日聞佞寇來降寫此快極。大千居士爰。
Traduction : "Dans ma jeunesse, j’avais l’esprit du Tao
Finalement, je me suis retiré du monde.
Dans le chaos des montagnes, [au milieu] des grands arbres,
De la mousse verte, des parfums et de la lumière.

Le troisième jour du septième mois de l’année Yiyou [1945], en apprenant que la capitulation japonaise est proche, ma joie est à son comble". L’ermite Daqian, Yuan.


Les vers qui accompagnent cette peinture évoquent une relation personnelle et directe à la nature. Ils sont pourtant empruntés au poète et critique Sikong Tu (837-908) qui vécut à l’époque des Tang. De la même manière, la composition de ce paysage est le fruit d’une réinterprétation complexe de différentes œuvres anciennes. La figure du solitaire perdu au milieu des arbres et contemplant une cascade est en effet dérivée d’une peinture de Chen Hongshou (1598-1652) conservée au musée de Cleveland. La facture picturale de l’œuvre de Chen Hongshou diffère néanmoins radicalement de celle de Zhang Daqian. Au lieu de tracés anguleux des montagnes du maître des Ming, Zhang Daqian a utilisé un ensemble de rides et de points dérivés des modèles Song. Quant à l’inspirateur des hauts pins aux profils torturés, absents de l’œuvre de Chen Hongshou, il s’agit sans doute de Wang Shen (vers 1048 – vers 1103) des Song. Un faux Wang Shen réalisé par Zhang Daqian se présente en effet comme un double archaïsant de la peinture du musée Cernuschi. Le lien entre ce faux et la peinture de Chen Hongshou avait été rétabli par Fu Shen (né en 1937), qui soulignait le caractère déroutant des créations de Zhang Daqian. La rencontre d’une composition datée des Ming et d’un style dérivé des Song a donc abouti simultanément à la réalisation d’un faux Song, peint sur une soie vieillie, et d’une peinture originale de Zhang Daqian, sur papier. La fraîcheur de la polychromie au niveau des feuillages, la facture stylisée des arbres donne à cette dernière œuvre une tonalité moderne. Le lettré, non plus assis comme chez Chen Hongshou, mais à demi allongé dans une posture typique de Zhang Daqian, continue de regarder la cascade.

Référence(s) : Bobot, Marie-Thérèse, Musée Cernuschi : collection des peintures et calligraphies chinoises contemporaines, Alençon : Imprimerie alençonnaise, 1985
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